La maison paraissait s'ouvrir directement sur la Voie Lactée.

Guy Debord, Panégyrique

On a parfois l’impression que le silence a une fonction essentielle : être la paupière qui dissimule le futur.

Inza Feuerbach, Le Manuscrit

UN SPECTACLE RARE (par les temps qui ne courent plus que vers l'uniformité)

Une pièce de théâtre peut-elle être autre chose qu’une performance exécutée devant un public condamné à la passivité ? Ce n’est pas l’habitude. Il semble même qu’il y ait une sorte de religion qui consiste à séparer les "officiants" (les acteurs) des "fidèles" (les spectateurs). Cela coïncide avec la séparation de plus en plus affirmée dans nos sociétés entre les élus (au sens institutionnel) et les citoyens, entre le domestique et le sauvage.

Partant de ce constat, on pourrait dire que l’auteur de La politique de la chaise vide a probablement une idée derrière la tête. Par bonheur, au lieu de la théoriser, d’en faire un credo, un système à ranger gentiment dans le grand classeur des utopies, Arnaud Montmajour préfère lui donner la densité d’une expérience. Le théâtre redevient ici le lieu et le mouvement d’une rencontre. L’articulation entre un Acte I structuré autour du jeu des acteurs et un Acte II intégralement improvisé avec le public soulèvera nombre d’objections. D’un côté, il ne manquera pas d’observateurs pour rappeler que, d’une certaine façon, cela s’est déjà fait. De l’autre, des septiques pour considérer qu'il est vain de sonder les fondations du Théâtre. A vrai dire, les uns et les autres commettront une erreur capitale en faisant barrage à l'invention. 

Il nous revient de considérer le parallèle entre ce texte et les phénomènes sociaux actuels tels que l'élévation notable du taux d'abstention aux élections et du taux de démission dans les entreprises. La stratégie de la chaise vide, la praxis de l'exception massive est peut-être l'un des instruments pour rapprocher Trieste et Venise, le politique et la poétique, deux territoires proches mais séparés par la ségrégation sans pitié d'un imaginaire appauvri. 

Pour suggérer la présence de la « Danseuse invisible » nous nous appuierons sur la dispersion spatiale de ses interventions. Le public pourra suivre avec précision son sillage sonore : plateau scénique mais aussi bien parterre ou paradis (cas d'un théâtre à l’italienne). Compte-tenu de ce qui précède, le spectacle pourra être également proposé dans un jardin, un parc, une forêt, une réserve naturelle, une planète B ;-)

A bon entendeur, salut !

Jean-Pierre Texier

Directeur artistique de la Compagnie élément 139

Texte intégral de la pièce et présentation au Collège International de Philosophie

Laissez-nous vos impressions !